Les Etats-Unis veulent torpiller la COP 21

Washington jette le masque : 

 

 

« Cet accord ne sera certainement pas un traité : il n'y aura pas d'objectifs de réduction juridiquement contraignants comme par le passé », a déclaré hier le secrétaire d'Etat américain (au Financial Times). John Kerry récuse ainsi l'objectif de la COP 21, qui est – en théorie – de relancer le processus ouvert à Kyoto en 1997. Autrement dit : les Etats-Unis torpillent d'avance le « sommet climat » de Paris...

La brutalité avec laquelle l'administration Obama jette le masque a estomaqué l'Elysée, qui s'évertue (élections obligent) à tenter de faire croire que la COP 21 est sur le bon chemin. François Hollande déclare : « l'accord sera contraignant, ou il n'y aura pas d'accord » ; ce qui n'est rien d'autre qu'une tautologie. Laurent Fabius, inquiet de voir vaciller d'avance son fauteuil de président de la COP 21, déclare : « Je pense que la formulation de John Kerry aurait pu être plus heureuse... » (Veut-il dire que l'Américain aurait pu dire la même chose en termes plus heureux, c'est-à-dire voilés ?). Fabius ajoute : « On peut discuter de la forme juridique de l'accord, en revanche il est clair qu'il devra comprendre des dispositions juridiquement contraignantes ! » La conférence mondiale « devra » ? En fait, elle court le risque – très plausible – de céder devant l'obstruction US, qui résonne comme un signal aux oreilles des nombreux Etats résolus à ne rien décider.

La seule chose surprenante dans cette affaire, c'est la surprise du gouvernement français. Personne n'imaginait Washington se ralliant à l'idée de dispositions contraignantes pour la réduction des gaz à effet de serre ; cela pour deux raisons américaines : la présence au Capitole d'une majorité républicaine qui nie le problème climatique*, mais surtout l'emprise du big business sur les présidences successives. La seule différence entre les gens d'Obama et ceux de GW Bush est que les seconds combattaient ouvertement l'écologie, alors que les premiers font semblant de l'approuver. En 2001, GWB avait refusé de ratifier Kyoto. En 2015, Obama fait la même chose tout en ayant pris la posture inverse.

M. Hollande a cosigné avec le président chinois une déclaration appelant à « un accord de Paris juridiquement contraignant ». C'était il y a dix jours ; on verra la suite.

Et de toute façon, qu'est-ce qu'un « accord juridiquement contraignant » s'il n'est pas assorti de sanctions ? Or il ne le sera pas, nous dit l'Elysée par la voix de sa négociatrice Laurence Tubiana : « La contrainte, ce sera l'obligation de transparence et l'effet de réputation. » Rideau.

Comme dit le pape dans Laudato Si'  (§ 166) : « Les Sommets mondiaux de ces dernières années sur l'environnement n'ont pas répondu aux attentes parce que, par manque de décision politique, ils ne sont pas parvenus à des accords généraux vraiment significatifs et efficaces... Aucun mécanisme adéquat de contrôle, de révision périodique et de sanction en cas de manquement, n'a été établi. » Au § 206, le pape nous appelle à « exercer une pression saine sur ceux qui détiennent le pouvoir politique, économique et social ». Soyons tous à la République le 29 novembre dans la Marche pour le climat : sans une saine pression de masse, rien ne changera.

 

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* En revanche, nombre de ces élus (surtout dans le Sud) sont persuadés que les dinosaures ont cohabité avec l'homme.